Les savants du palais

Pie XI décida de renouveler l’épiscopat en ne nommant que de « bons évêques » c’est à dire des évêques ralliés à la république.

En 13 ans, c’est à dire de 1926 à la mort du Pape en 1939, l’épiscopat français fut renouvelé de fond en comble, les évêques refusant les lois laïques furent remplacés par des évêques à qui il fit demander de pratiquer « loyalement les vertus du citoyen et notamment le respect du pouvoir établi. »

En dix ans on passa d’une majorité hostile à la république et son fondement laïc à une quasi unanimité en sa faveur.

Ce bouleversement, cette révolution dogmatique, qu’est le dogme du ralliement à une longue histoire et l’auteur Philippe Prévost nous en propose l’analyse.

Par leur apparente soudaineté et leur violence les événements révolutionnaires surprirent tout le monde, forte de ses succès en France où la majorité des élites avaient été gagnées aux idées nouvelles, la révolution voulut imposer aux catholiques après les avoir spoliés, les mêmes principes que ceux qui venaient de triompher dans l’ordre politique.

Mais Pie VI refusa que soit porté atteinte à la constitution de l’église.

Son encyclique Quod aliquantum du 10/03/1791 condamnait la constitution civile du clergé votée par l’assemblée nationale.*

Ce geste courageux conduisit Louis XVI à désavouer le texte qu’il avait d’abord signé.

Ce désaveu fut la cause majeure de l’abolition de la monarchie et de l’exécution du roi.

La monarchie très chrétienne était évidemment incompatible avec la philosophie nouvelle qui faisait de on’’homme la mesure et la fin de toutes choses.

C’est pourquoi Pie VI qualifia Louis XVI de martyr dans son allocution du 12/06/1793.

Ces attaques de l’assemblée nationale contre l’église et le roi furent l’occasion pour le clergé et nombreux fidèles d’entrer en résistance.

L’épopée vendéenne fut l’exemple le plus illustre et le plus scandaleux puisque au nom de la liberté de conscience les républicains massacrèrent la population de toute une province dont le seul crime était de vouloir rester catholique.

L’abbé Grégoire demanda au Pape d’abroger son encyclique, mais celui ci refusa, la première tentative de ralliement avorta.

Napoléon et ses armées commencèrent à remodeler l’Italie en créant divers états arrachés à l’Autriche, le saint siège…

La présence française devient pesante pour les populations habituées à leurs libertés et attachées à leur foi, elles songèrent alors à se révolter.

Le nouveau Pape Pie VI monta en chaire et prononça un discours à l’occasion de Noël :

« La liberté, chère à Dieu et aux hommes est une faculté qui fut donné à l’homme, un pouvoir de faire ou de ne pas faire, mais toujours soumis à la loi divine et humaine.

Il n’excède pas raisonnablement sa faculté de liberté celui qui rebelle et impétueux s’oppose à la loi; il n’exercé pas sa faculté celui qui contredit la volonté de Dieu et la souveraineté temporelle.

Comme dit Saint Paul qui résiste au pouvoir résiste à l’ordre de Dieu. »

S’opposer aux pouvoirs établis mêmes les plus pervers revenait donc à s’opposer à Dieu.

Cette théologie audacieuse préparait la doctrine du ralliement.

Le Pape déclara également « la forme du gouvernement démocratique adoptée parmi nous, n’est pas en opposition avec les maximes exposées ci dessus et ne répugne pas l’évangile.

Elle exige au contraire toutes les vertus sublimes qui ne s’apprennent pas à l’école de Jesus et qui si elles sont religieusement pratiquées par vous, formeront votre félicité, la gloire et l’esprit de la république…

Que la vertu seule qui perfectionne l’homme et qui le dirige vers le but suprême, le meilleur de tous, que cette vertu seule vivifiée par les lumières naturelles et fortifiée par les enseignements de l’évangile soit le solide fondement de notre démocratie. »

Pie VII fut nommé pape et à la demande du premier consul fit démissionner les évêques d’ancien régime qui avaient préférés quitter la France que prêter serment à la révolution et désobéir au pape de l’époque Pie VI.

Puis il nomma de nouveaux évêques constitutionnels, le Pape se ralliait au nouveau régime, c’est à dire à la révolution.

Pie VII donna au chef d’état le droit de nommer les évêques, il donna une sorte d’onction au régime issu de la révolution.

Ce privilège qui se justifiait sous l’ancienne monarchie dans la mesure où le roi de France, chrétien, était sacré et protecteur du clergé, mais ça l’était beaucoup moins avec Bonaparte dont la philosophie politique de son régime était anti chrétienne par essence et pour qui le concordat n’était pas l’expression de sentiments religieux mais de la raison d’état.

Son acte est purement politique, il voulait l’appui du Pape pour réorganiser les catholiques de France sous l’obéissance républicaine et pour briser l’épiscopat de l’ancien régime.

Napoléon voulait avoir un corps de fonctionnaires ecclésiastiques aussi dociles que les fonctionnaires ordinaires.

Pie VII refusa d’appliquer le blocus continental, à savoir l’entrée en guerre contre l’Angleterre.

Ses états furent spoliés et il fut emprisonné à fontainebleau.

*https://laviedelivre.wordpress.com/2018/08/31/encyclique-sur-la-constitution-civile-du-clerge-decretee-par-lassemblee-nationale/

Source « L’église et le ralliement » Philippe Prévost