Capitalisme et esclavage

Quand Christophe Colomb en 1492 mis les pieds au « nouveau monde » il déclencha une rivalité internationale à propos des possessions coloniales.

Le Portugal qui avait pris l’initiative du mouvement d’expansion internationale revendiqua les nouveaux territoires sur la base d’une bulle papale de 1445 qui l’autorisait à réduire en esclavage tous les peuples infidèles.

Pour éviter un conflit l’Espagne et le Portugal cherchèrent un arbitrage auprès du Pape.

Après avoir étudié leurs revendications le Pape publia plusieurs bulles établissant une ligne de démarcation entre les possessions coloniales des deux états: l’est alla au Portugal et l’Ouest à l’Espagne.

Insatisfait le Portugal réussi à obtenir de l’Espagne un compromis, le traité de Tordesillas lui permettait de posséder le Brésil.

L’arbitrage Papal n’avait pas été conçu pour engager les autres puissances.

François 1er déclara « le soleil brille pour moi comme pour les autres. J’aimerais bien prendre connaissance de la clause du testament d’Adam qui m’exclut du partage du monde. »

Le roi du Danemark refusa de tenir compte de l’édit papal, du moins en ce qui concerne les Indes orientales.

En 1580, le gouvernement Anglais contre-attaque en posant le principe de l’occupation effective des terres comme facteur déterminant de la souveraineté.

Une dispute sévère s’engagea entre ces différents pays européens, tous réclamant leur place au soleil.

Le nègre aussi allait trouver sa place au soleil bien qu’il ne l’eut pas réclamée, une place sous le soleil brûlant des plantât de sucre et de coton du nouveau monde.

Selon Adam Smith la prospérité des colonies dépend d’un seul facteur économique, l’exploitation des bonnes terres, compte tenu de la population restreinte de l’Europe, les travailleurs libres nécessaires aux cultures d’exportation de sucre, coton…n’étaient pas disponibles.

Ainsi l’esclavage s’avéra présenter de nombreux avantages.

L’esclavage n’est pas né du racisme mais le racisme a été plutôt la conséquence de l’esclavage.

L’esclavage est né d’une réalité économique, les premiers esclaves du nouveau monde étaient les indiens et non les nègres.

Ces derniers furent incapables de s’adapter à cette nouvelle vie, souffrant de l’excès de travail, l’insuffisance de nourriture et ils mourraient des maladies importées par le blanc.

L’esclave indien était donc d’un faible rendement, les espagnols découvrirent qu’un nègre valait 4 indiens.

L’esclavagisme des indiens ayant refusé de devenir chrétiens étaient justifiés par les papes, les espagnols réclamèrent dès 1518 la permission de mettre en esclavage les nègres, le noir était plus résistant que l’indien et le réservoir de nègre inépuisable alors que celui des indiens limité.

C’est pourquoi on vola des nègres en Afrique pour les faire travailler sur les terres volées aux indiens d’Amérique.

Le successeur de l’indien ne fut pas tout de suite le nègre mais « le petit blanc », ces travailleurs blancs qui avaient signé un contrat avant leur départ de la métropole les obligeant à une prestation de services pour un temps équivalent au prix de leur passage.

D’autres n’ayant pas payé au capitaine le prix du voyage étaient vendus par celui ci au plus offrant.

Ainsi que des prisonniers condamnés par décisions gouvernementales à servir pendant une période définie dans les colonies.

Cette émigration possédait pour les pays européens deux avantages, elle permettait de se débarrasser des classes pauvres et d’avoir une main d’œuvre pas cher pour ses colonies.

Ces « petits blancs » fuyaient leurs conditions en Europe pour finalement être asservis dans le nouveau monde.

La spéculation commerciale fit son apparition avec ses abus, le kidnapping fut exercé, on avait raison des adultes par l’alcool, des enfants par des friandises…

Les racoleurs s’emparaient des hommes, femmes et enfants et les vendaient au delà des mers.

Par la suite on commença à se plaindre de cette émigration de pauvres ou de repris de justice et on exigea que cela cesse car il n’était pas concevable de construire un nouveau monde avec ce type de population.

Ces « petits blancs » avaient des conditions désastreuses mais pouvaient espérer accéder à une liberté rapide une fois leur contrat finis où leur peine effectué alors que le nègre lui était esclave pour la vie et ses enfants héritaient de par leur mère du statut d’esclave.

Ainsi mieux valait des esclaves noirs que ces travailleurs blancs qui aspiraient à l’indépendance et la liberté.

De plus l’évasion était facile pour le blanc qui pouvait se fondre dans la ville alors que le nègre en fuite n’avait pas d’espoir de pouvoir se fondre parmi la population.

Ces conditions permettaient d’obtenir du nègre une obéissance mécanique ce qui n’est pas possible pour le blanc qui a la fin de son contrat recouvre sa liberté.

Le travailleur noir coûtait également moins cher qu’un blanc.

C’est ici que se situe l’origine de l’esclavage noir, sa raison d’être est économique et non raciale, lié au bas prix de son travail et non à la couleur du travailleur.

Ainsi l’esclavage indien et la servitude blanche cédèrent le pas à l’endurance, la docilité et la capacité de travail de l’homme noir.

La rationalisation de l’esclavage du nègre et son bien fondé apparurent par la suite afin de le justifier.

L’abolition de l’esclavage ne fut pas effectif dans un but de liberté mais dans un but économique: « le travail fourni par un esclave coûte plus cher que le travail d’un homme libre. » comme le dit Merivale.

L’esclavage noir nécessitait la traite des Noirs.

La première expédition de traite britannique fut celle de 1562, les esclaves pris furent vendus aux espagnols dans les Antilles.

Le commerce des esclaves fut confié à la « company of royal adventurers » qui eu le monopole de la traite des noirs, monopole qui lui était contesté par les commerçants libres.

En 1698 le monopole fut perdu et la liberté de la traite des noirs fut reconnue comme un droit fondamental et naturel.

La liberté accordée au commerce d’esclaves différait sur un seul point de celle accordée aux autres commerces: la marchandise était humaine.

Liverpool devint le port du trafic d’esclave de référence.

Les négriers vérifiaient si la langue de l’esclave était bien rouge, sa poitrine large et son ventre plat, conseillait de les achetez jeunes afin qu’ils grandissent sans penser que le travail est dur…

Les gouvernements, l’église et l’opinion publique acceptaient l’esclavage et l’encourageaient.

L’église refusait même que les esclaves soient invités au christianisme qui serait susceptible de les émanciper et obligerait à leur donner des jours de repos comme le dimanche ou les jours de fêtes.

On peut signaler l’hypocrisie de ce pays qui encourage un commerce détestable alors qu’il se pique de vertu, d’amour de la liberté et de justice.

Quand certains intellectuels commencèrent à protester contre l’esclavage, les esclavagistes tentèrent de convaincre que les noirs étaient les plus heureux du monde, un gentleman de l’île Maurice demanda même à sa femme de confirmer ce jugement en témoignant de ce qu’elle avait vu, elle dit « oui ils étaient très heureux, j’en suis sûre, mais seulement j’ai trouvé ça bizarre de voir les cuisiniers noirs enchaînés aux fourneaux. »

Le profit commercial suffisait à empêcher les esclavagistes à réfléchir au caractère inhumain de leur commerce et beaucoup d’entre eux ne faisaient que suivre leurs coreligionnaires sans jamais n’avoir réfléchi à la teneur de leur négoce.

Les capitalistes avaient commencé par encourager l’esclavage puis ils contribuèrent à sa suppression dans certaines colonies, à savoir aux Antilles.

L’esclavage pour eux était une chose relative et non absolue, ils ne voyaient l’esclave que là où ils voyaient le sucre.

L’esclavage n’étant que purement économique quand l’intérêt financier ne fut plus celui de l’esclavage son abolition devint la priorité, la moralité n’ayant pas sa place dans la question de l’esclavage ou de son abolition.

« Un humanitarisme lucratif. »

Face aux crises économiques qui frappaient les colonies antillaises l’abolition de l’esclavage apparaissait comme la seule issue à ce qu’elles redeviennent prospères.

Ainsi les capitalistes anglais détruisirent l’esclavage aux Antilles gluten en continuant à en profiter au Brésil, à cuba et en Amérique.

Les antillais avaient raison de se demander si l’esclavage n’était répréhensible que dans les pays avec lesquels ne commerçaient pas les abolitionnistes ou dans lesquels ils n’avaient pas de clientèles.

Source « capitalisme et esclavage » Eric Williams