Le Cheikh sortit de sa réserve le 16 avril 1964, jour anniversaire de la mort du Ben Badis et rédigea un mémorandum fort critique à l’égard du régime de Ben Bella.
Le Cheikh écrivit « Dieu m’a accordé la grâce de vivre jusqu’à l’indépendance de l’Algérie. Ce jour là, je pouvais affronter la mort, l’âme en paix car il me semblait transmettre le flambeau du combat pour la défense du véritable Islam et la renaissance de la langue arabe, combat qui fut la raison de ma vie, à ceux qui prenaient en mains les destinées du pays. Je décidai en conséquence, de garder le silence. Aujourd’hui anniversaire de la mort de Ben Badis, je me vois contraint de rompre le silence car l’heure est grave : notre pays glisse de plus en plus vers une guerre civile inexpiable, une crise morale sans précédent et des difficultés morales insurmontables. Les gouvernants ne paraissent pas réaliser que notre peuple aspire avant tout à l’unité, à la paix, à la prospérité et que leurs fondements théoriques de leur action, doivent être puisés non dans les doctrines étrangères mais dans nos racines arabo-islamiques L’heure est venue où les responsables doivent donner l’exemple du sacrifice, où seules la probité et la compétence doivent entrer en ligne de compte, où l’intérêt général doit primer. L’heure est venue de revaloriser le terme, si galvaudé, de fraternité et de retourner au principe de la consultation si cher au Prophète. L’heure est venue enfin de sonner le rassemblement de tous les enfants de l’Algérie afin qu’ils bâtissent ensemble une Cité de justice et de liberté, une Cité où Dieu aura sa place »
Suite à son discours il fut assigné à résidence.
Taleb Ibrahimi Ahmed, Mémoire d’un Algérien, Tome 1 : Rêves et épreuves (1932-1965)