Massignon, Lawrence, les arabes et la Palestine

Des lettres sont échangées entre le chérif de la Mecque, Hussein et le haut commissaire britannique en Égypte, sir Henry MacMahon en 1915.

Puis les accords sykes-picot en 1916 tracent un cadre diplomatique provisoire.

L’idée des alliés est de favoriser un soulèvement arabe contre l’empire Ottoman, les britanniques ont des préoccupations stratégiques et politiques et s’intéressent de très près aux affaires du moyen orient afin de protéger les voies de communication vers les Indes, la France estime elle avoir des privilèges historiques dans la région, notamment en Palestine.

Le chérif Hussein en échange d’un soulèvement arabe demande l’indépendance des pays arabes et la reconnaissance britannique d’un califat arabe, lui qui avait été placé comme chérif des lieux saints par l’empire Ottoman.

Il prend le titre de roi en octobre 1916 et proclame la révolte le 05/06/1916, les turcs reprennent la Mecque.

Britanniques et français bien qu’alliés sont opposants sur les questions liées à leurs intérêts dans la région, mais ils tombent sur un accord commun avec l’accord de sykes-picot, cet arrangement secret partage le Moyen-Orient arbitrairement entre les deux pays .

La Palestine quant à elle doit avoir une administration internationale.

Cet accord ne prend pas en compte les revendications du chérif Hussein qui lui avaient été pourtant garantis.

L’accord restera secret jusqu’à ce que les russes en informent le chérif en novembre 1917.

La déclaration Balfour concernant l’instauration d’un foyer national juif en Palestine acheva de compliquer l’affaire et de donner aux arabes le sentiment d’avoir été trahis.

Louis Massignon alors sous lieutenant d’infanterie est détaché à la mission franco-britannique Sykes-picot, il est choisi pour cette tâche grâce à sa maîtrise de la langue arabe.

Sa mission va lui faire rencontrer Mark Sykes et l’émir Faissal, troisième fils du chérif Hussein avec qui il va se lier d’amitié.

Il rencontra également Lawrence d’Arabie qui avait pour mission de lever les bédouins arabes contre les Ottomans afin de faire triompher les intérêts britanniques, tout en les écartant de Jérusalem et de damas.

Ces bédouins devaient faire simultanément à la menace des troupes wahhabites grand rival des hachémites, dirigés par Ibn Saoud soutenu par les responsables militaires britanniques en particulier ceux chargés de l’administration des Indes.

Faissal fils de Hussein était privilégié des français, qui espéraient qu’il devienne le futur roi, Massignon fut chargé de lui faire parvenir de l’argent, les britanniques firent de même soucieux de s’occuper de leur protégé.

Très rapidement la rivalité entre les deux alliés s’est exacerbée à mesure que les positions turcs s’effritent.

Lawrence voulait fonder un nouveau royaume arabe avec Faissal comme souverain, avec Damas comme capitale, un royaume où les britanniques pourraient jouer un rôle actif mais en visant la Palestine et la Syrie ils se heurtaient aux français.

Le gouvernement des Indes était très inquiet de l’apparition d’une nation arabe dont l’exemple risquerait de donner des idées d’indépendances aux musulmans de l’Inde, pour Philby Lawrence avait parié sur le mauvais cheval en jouant exclusivement la carte Faisal et la dynamique hachémite, pour lui il fallait soutenir Ibn saoud, chef wahhabite et grand rival des hachémites, qui était à la tête d’une armée et d’une structure sociale plus solides que celles de Hussein.

L’avenir lui donnera raison.

Quand Jérusalem fut prise aux Ottomans, l’accord prévoyait que l’administration soit internationale, Lawrence était chargé de faire croire au roi Hussein que la ville sainte lui serait confiée mais il apprit les tractations de Lord Balfour avec Lord Rothschild pour la création d’un foyer juif, il ressentit le sacrilège commis contre la parole donnée aux arabes.

Massignon affirme que Lawrence fut si choqué que quand on l’interrogea sur l’accord de Balfour il mima le geste d’uriner sur l’état major.

La loyauté de Lawrence en qualité d’officier le lis souvent en porte à faux vis à vis des arabes.

Rapidement il s’adapte à cette nouvelle donnée et va d’ailleurs patronner l’entrevue entre Chaïm Weizmann, chef du mouvement sioniste et Faissal en juin 1918, ainsi que l’accord qu’ils signeront en janvier 1919.

Weizmann déclara « son dévouement à notre cause fut infini. »

Lawrence voyait dans la déclaration Balfour un moyen de tenir la France à l’écart de la Palestine et de la Syrie .

Lui qui avait orchestré l’horreur, la honte et l’humiliation en dirigeant les arabes selon les intérêts britanniques subis à son tour l’humiliation, parti en reconnaissance derrière les lignes turques, il est arrêté à Deraa, fouetté et torturé, puis violé par le gouverneur turc de la ville.

Massignon révèlera dans ses mémoires l’homosexualité de Lawrence d’Arabie et ses aventures avec certains arabes, homosexualité qui donna lieu a des poèmes, tel celui de Hamza Ibn Abi Daygham, un membre de tribu qui fut tenté par Lawrence et calma sa pulsion en l’embrassant afin de ne pas tomber dans le péché de la sodomie, préférant rester chaste que de tomber dans l’interdit.

Il dit dans son poème :

« Nous dormîmes tous deux en arrière des nôtres mais sans rejoindre l’ennemi…

De nos cœurs battants, égaré

Grâce à Dieu, nous avons chassé la jeune fièvre.

Et nous rentrons désaltérés,

Mais chastes, notre soif calmée entre nos lèvres. »