Thomas Urbain, ni noir, ni blanc, ni maître, ni esclave mais musulman

Thomas Urbain est né le 31/12/1812 en Guyane alors colonie française depuis 1624.

L’esclavage aboli en 1794 avait été rétabli en 1802.

Au début des années 1800, la Guyane comptait moins de 1000 blancs, 1000 personnes de couleurs libres et 1000 esclaves.

Nommé gouverneur en 1800, Victor Hugues prit un certain nombre de mesures discriminatoires à l’égard de la nouvelle classe des gens de couleur libres.

Leur nombre ne cessait d’augmenter et l’apparition d’une élite commençait à menacer l’ordre colonial esclavagiste, l’obligeant pour se maintenir à pratiquer une ségrégation fondée sur l’assimilation de la couleur à la tache ineffaçable de la servitude.

Il adapta le code civil en restreignant les droits des gens de couleurs libres bien au delà de ce qu’avait prévu l’ancien régime dans le code noir de 1685.

Par exemple l’article 6 de l’arrêté du 1er vendémiaire à XIV déclarait « les mariages ne pourront être contractés que de blancs à blancs et de gens de couleur à gens de couleur. »

L’article 7 « la reconnaissance des enfants naturels ne pourra être faite que d’un père ou d’une mère blanc en la personne d’un enfant blanc ou d’un père ou d’une mère de couleur en faveur d’un enfant de couleur. »

L’article 13 « toute donation entre vifs ou simple donation faits par un blanc à un individu de couleur sont déclarés nuls et de nul effet. »

A sa naissance Thomas Urbain Appoline a été déclaré à l’état civil comme le fils naturel de la mulâtresse libre Appoline.

Née dans l’esclavage, celle ci avait été affranchie à l’âge de 6 mois en même temps que sa mère, mulâtresse également à qui son maître blanc, père de sa fille avait donné la liberté peu de temps après l’avoir achetée.

Sur l’acte de naissance son père Jean Baptiste Honoré Urbain Brue est mentionné comme témoin de l’existence de l’enfant, enfant noir d’un blanc son père ne pouvait pas le reconnaître.

Âgé de 40 ans avec Appoline, jeune mulâtre de 18 ans sont nés 12 enfants.

En 1820 quand il décida de rentrer en France il emmena avec lui le jeune Thomas âgé de 7 ans.

En France le père se fit passé pour le tuteur de ce « batard » pour justifier l’intérêt qu’il lui portait, il avait même rédigé un faux acte d’état civil indiquant que le père et la mère de Thomas étaient noirs.

Cette situation fit beaucoup souffrir Thomas, il souffrait de ne plus avoir de famille côté paternelle.

Une fois ses études terminées il repartit en Guyane, âgé alors de 18 ans, mais il fut mal accueilli par sa famille maternelle et découvrit rapidement la réalité de la société coloniale et l’ambiguïté de son statut d’homme de couleur.

Il écrivit « les hommes de couleur ne sont pas blancs, ils ne sont pas noirs, ils ne sont pas esclaves, ils ne sont pas maîtres. »

Il quitta la Guyane pour retourner en France.

De retour à Marseille il intégra la communauté religieuse « Saint simonien » , dans sa quête d’identité il voyagea en Égypte où il rencontra une femme noire plus âgé que lui, originaire d’abyssinie, terre d’origine de sa mère, qui malgré son baptême était restée profondément attachée aux mœurs musulmanes de son enfance.

A son contact il découvrit la tolérance de l’islam et son rejet du racisme, il se convertit a l’islam et se fit désormais appeler Ismayl, en référence au prophète Ismail né d’une esclave et abandonné avec sa mère dans le désert de la Mecque.

Rentré en France, il repartit rapidement en voyage cette fois ci en Algérie, terre africaine et terre d’Islam, il la fit sienne.

Il épousa une musulmane dont il eut une fille.

Mais haïs du parti des « colonistes » il dut quitter l’Algérie en 1870.

Il n’y retournera qu’en 1882 où il mourut dans l’indifférence.