Travailler, comme nous l’avons fait, sur les représentations des pauvres par les plus fortunés exposé à une évidence: ces derniers ont très souvent la conviction de savoir précisément ce que vivent les pauvres, alors même que ceux-ci sont complètement étrangers au monde dans lequel ils évoluent et qu’ils ne les côtoient pratiquement pas.
Ils s’appuient sur des préjugés et des fictions rendant compte des raisons pour lesquelles les pauvres sont pauvres.
La diffusion de ce répertoire est de toute évidence facilitée par la vie sociale en vase clos qui prédomine au sein de ces quartiers.
Il se construit ainsi un ordre moral à l’échelle des beaux quartiers en rupture avec ce qui est vécu dans les autres espaces de la métropole.
Si les quartiers les plus défavorisés de la république française témoignent de l’existence d’une « fracture sociale », cela est sans doute plus vrai en ce qui concerne les quartiers les plus privilégiés.
Les beaux quartiers témoignent d’une profonde coupure avec la plus grande partie de la société française.
Les classes supérieures ont un poids disproportionné sur les décisions individuelles et collectives contribuant à la perpétuation ou à l’aggravation des inégalités et à la légitimation ou à l’inverse à la délégitimation des politiques de lutte contre la pauvreté.
Elles ont aussi un rôle important dans la diffusion des discours de stigmatisation des pauvres, au rang desquels figure notamment l’établissement d’un lien entre la pauvreté et le supposé communautarisme des habitants des quartiers relégués.
Source « communautarisme? » Éditions PUF