On entend souvent au sujet de l’histoire, que nous importe le passé, pourquoi être toujours focalisé dessus au lieu de regarder vers l’avenir, or hier comme aujourd’hui c’est l’Histoire que l’on convoque pour interpréter les faits actuels.
Machiavel a exhumé plus de 1000 ans d’histoire de l’empire de Rome depuis sa fondation jusqu’à son effondrement pour comprendre comment sauvegarder un état et ce qu’il faut faire pour lui éviter le naufrage.
L’histoire est une suite d’événements sans fin.
Elle est le témoin de la vie des nations, de leurs grandeurs mais aussi des faiblesses qui précèdent leurs disparitions.
On ne peut changer le cours du passé mais l’avenir de l’humanité appartient à tous ceux qui savent tirer les enseignements et fonder de nouveaux rapports à l’histoire que nous écrivons.
La civilisation née aux confins du Maghreb islamique a duré près de huit siècles.
Son point d’aboutissement coïncide avec la renaissance de l’Europe occidentale.
Gustave Le Bon dit « c’est toujours dans le passé des peuples qu’il faut chercher les causes des événements présents. »
Expansion de l’islam hors d’Arabie
Le calife Omeyyade Al Walid Ibn abdelmalik accorde à son gouverneur au Maghreb Moussa Ibn Nocair les moyens nécessaires pour conquérir les terres chrétiennes, il désigne Tarik Ibn Ziyad chef des armées et lui autorise d’explorer avec prudence l’Espagne .
L’Espagne est divisée par des guerres intestines, Roderic a supplanté le pouvoir à Akhila, la noblesse wisigothique appuyée par des opposants à l’église catholique se rend à tanger demander l’aide de Tarik pour rénover Roderic.
Moussa envoie Tarik en reconnaissance, satisfaisait de l’opération il met en place les préparatifs pour la bataille .
En avril 711 la traversée commence et durera 3 mois, à leur arrivée Tarik fait brûler les vaisseaux qui les ont amené pour ôter tout espoir de retraite à ses troupes et donne l’ordre d’attaquer l’armée du comte Theodomir.
Le roi Roderic informé de l’incursion arrive en renfort.
Les deux armées se font face, les musulmans sont inférieurs en nombre et moins bien équipés, ou bout de 3 jours les musulmans commencent à perdre courage, Tarik se lève sur ses étriers et dit « musulmans, ou aller, ou vous mène une fuite inconsidérée ? Vous avez la mer derrière vous et l’ennemi devant, il ne vous reste de ressource que votre valeur et l’aide de Dieu. Faites, chevaliers, comme vous me verrez faire. »
Puis il s’élança vers l’ennemi, traversant les lignes il perça d’un coup de lance le roi Roderic qui tomba raide.
L’armée suivit son exemple et les chrétiens se débandèrent.
Profitant de l’avantage les musulmans se répandirent à travers tout le pays, les espagnols n’opposèrent alors aucune résistance.
Moussa Ibn Nocair met pied en Espagne laissant la gouvernance de l’Afrique à son fils.
Moussa jaloux de la réussite de Tarik s’en pris à lui allant jusqu’à l’emprisonner, le calife avertit de ces dissensions ordonna sa libération, leur réconciliation et les convoqua en Orient, il le blâma pour son comportement vis à vis de Tarik.
L’histoire retiendra Tarik comme un héros, même les juifs et les chrétiens le mentionnent avec respect pour sa bonté et son respect de leur religion et leurs coutumes.
On a peu d’information sur la fin de vie de Tarik si ce n’est qu’il vécu à Damas jusqu’à sa mort.
Les musulmans solidement installés en Espagne décident d’organiser des expéditions dans la gaule voisine gouvernée par les mérovingiens, dirigé par Ibn suhaym ils s’emparent de Narbonne, Carcassonne, Nimes, Lyon, Macon…et se répandent dans toute la vallée du Rhône, dans le dauphiné et la Bourgogne.
Puis l’armée parvînt aux portes de Paris: à sens (130 km de Paris) où elle stationne.
Ces expéditions n’étaient pas une invasion mais ne visaient que le fait de piller les richesses comme le dit François Micheau.
Après un siècle de victoires sur la quasi totalité de l’Espagne et du sud de la France, voici venir les premières défaites, celle de Poitiers étant la plus connue.
En 721 le gouverneur d’Anbassa Ibn Suhaym mène une bataille sous les murs de Toulouse face au roi Eudes duc d’Aquitaine, Mérovingien petit fils de Dagobert 1er.
Le siège durera 6 mois, aidé des troupes de Charles Martel, petit fils de Clovis.
Une bataille terrible s’engage, il y eut 3875 morts côté musulman dont l’émir El Shamh et tous ses généraux.
Les survivants se replient sur l’Espagne.
On ne parle peu de cette défaite car la victoire appartient à Eudes un mérovingien et que le famille des Capétiens s’apprêtait à prendre le pouvoir, or cette bataille plus que celle de Poitiers fut une véritable défaite.
A la suite de cette bataille Charles Martel ne cesse de piller les biens de l’église afin de constituer une armée prête à recevoir la prochaine campagne Omeyyade.
Ce qui lui vaut une grande inimitié de la part de l’église mais après la bataille de Poitiers, Rome va rapidement voir la nécessité de cette armée.
Le gouverneur suivant, Haytam Al kulabi ne fut pas un modèle, il eut une politique sectaire vis à vis des non arabes ce qui entraîna la discorde entre les musulmans au profit des gouvernants de la gaule.
Le calife Omeyyade Abou Al Walid souhaitant mettre fin aux discordes nomma Abderrahman Al Ghafiqi comme gouverneur.
Il restaure la cohésion et l’unité, puis après restructuré son armée fonce vers les Pyrénées non dans l’objectif de poursuivre les conquêtes mais pour piller l’Aquitaine.
Le duc d’Aquitaine, Eudes fait appelle à Charles Martel, qui accepte en échange de la soumission de Eudes.
Pendant une semaine des escarmouches ont lieu, puis l’affrontement décisif durera deux jours, les francs parviennent à faire reculer les musulmans qui sont alors pris à revers par Eudes, croyant leurs familles menacés les musulmans regagnent leur campement après avoir subis de lourdes pertes dont la mort d’abderahman lui même, le lendemain Charles Martel attaque le camps des musulmans mais celui est déjà vide.
Charles Martel détesté par l’église est soudainement devenu le sauveur de l’occident et le protecteur de la chrétienté.
Malgré cet échec infligé par Charles Martel les musulmans continuèrent à occuper leurs anciennes positions et se maintinrent en France pendant encore 2 siècles.
Le véritable vaincu de Poitiers est Eudes d’Aquitaine.
Gustave le Bon dit « Charles Martel n’a point sauvé l’Europe, il ne réussit pas à chasser les musulmans des villes qu’ils occupaient, il dut plutôt battre en retraite le seul résultat de sa victoire fut de rendre les arabes moins aventureux dans leurs razzias vers le nord de la France. »
Il continue en disant « supposons que les chrétiens n’eussent jamais réussi à repousser les arabes, l’Espagne qui grâce à eux jouissait d’une civilisation brillante quand le reste de l’Europe était plongé dans la barbarie, il est évident que les populations chrétiennes n’auraient eu qu’à gagner à se ranger sous la bannière du Prophète.
Ils auraient éviter les guerres de religion, l’inquisition et toutes ces calamités qui ont ensanglanté l’Europe et que les musulmans n’ont jamais connus.
Anatole France cite dans « la vie en fleurs »: « M Dubois demanda une fois à Madame Nozière quel était le jour le plus funeste de l’histoire, elle répondit qu’elle ne savait pas. Il lui dit c’est le jour de la bataille de Poitiers, quand en 732, la science, l’art et la civilisation arabes reculèrent devant la barbarie franque. »
L’historien Charles André Julien explique que si les arabes après Poitiers n’ont pas continué leur progression vers le Nord c’est qu’ils n’avaient pas d’intérêts majeur à pénétrer dans ces terres dépourvues de richesses parmi des populations qu’ils jugeaient arriérées.
Françoise Michaud dit « bien des voix se sont élevées pour tenter de ramener la bataille de Poitiers à sa juste place. En vain, car érigé en symbole, l’événement est passé à la postérité ainsi que son héros Charles Martel.
Il appartient à ce fond idéologique commun fondant la nation française, la civilisation chrétienne sur la mise en scène du choc des civilisations et l’exclusion de l’autre. »
Après la mort d’Abderahman, les guerres intestines divisèrent les musulmans, les espagnols entamèrent le long combat qui conduira à la reconquista.
En 720 la guerre civile entre communautés musulmanes ne cesse de s’amplifier.
L’insurrection berbère au Maghreb appuyé par le kharidjisme, entraîne des soulèvements berbères en Espagne et menace Cordoue et Tolède.
A la même période une sanglante dispute de pouvoir oppose Omeyyades et Abbassides.
L’empire est proche de l’implosion.
Les rangs de la communauté sont rongés par l’anarchie.
Les bibliothèques sont brûlées, la reconquista va commencer.
Les massacres commencent, nombreux fuient vers le Maroc actuel, les villes tombent une après l’autre entre les mains des chrétiens.
Ferdinand d’Aragon et Isabelle de Castille deviennent maître de toute l’Espagne.
A la chute de Grenade ils promirent la liberté aux musulmans, mais en réalité il n’eurent d’autre choix que la conversion, l’exil ou la mort.
Isabelle laisse 4 mois aux juifs pour se convertir ou quitter l’Espagne sans quoi ils subiront la peine de mort, l’édit prenant effet le 31/03/1492, 160 000 juifs iront chercher refuge en Afrique du Nord.
Un certain nombre trouveront refuge auprès du sultan Ottoman, on les nommera les sepharades.
Les clochers remplacent les minarets, de nombreuses familles andalouses se jettent en mer sur des rafiots de fortune, ceux qui ne mourront pas en mer seront sauvés par les frères Barberousse.
La conversation au Christianisme fait partie des conditions de reddition, l’inquisition religieuse commence.
Toute judaïté et islamité est bannie d’Espagne.
Les musulmans sont expropriés et obligés de vivre dans des ghettos hors des villes.
Les juifs qui était dans le collimateur des chrétiens depuis longue date suspectés d’avoir remis à Tariq Ibn Ziyad les clés de l’Andalousie furent les premiers à subir l’inquisition.
Ils durent se convertir et furent surnommés « conversos » en 1413 lors du Concile de zamora les juifs non converti furent obligés de porter un cercle rouge et expulsés dans des ghettos puis il fut décidé de les enfermer et ensuite de jeter au bûcher ceux qui refusent la conversion.
Après les juifs les morisques
Craignant que les morisques puissent se lier à l’empire Ottoman qui prenaient du pouvoir en Méditerranée, il fut décidé de les tuer ou les expulser.
Afin de convaincre les plus récalcitrants les morisques furent présentés comme des terroristes, des maîtres du mal, on les accusa même d’avoir introduit la lèpre en Espagne.
Les historiens estiment qu’entre 500 000 et 1 million de personne furent déportés et dépossédés de leurs biens.
Quelques détails sur la dynastie Omeyyade et Abbasside:
La dynastie Omeyyade
Muawiyah instaure depuis Damas, ville louée pour sa beauté et son opulence, un état arabe séculier fondé sur la caste dirigeante arabe, toutefois l’islam demeure l’une des bases de son autorité.
Il participe à de nombreuses conquêtes.
Dans un premier temps il conserve la machine administrative des perses et des byzantins organisés en 3 branches:
⁃ affaires religieuses
⁃ Affaires politiques et militaires
⁃ Affaires fiscales
Le personnel et la monnaie reste intact dans les provinces conquises, puis il décide de substituer aux anciens systèmes administratifs un nouveau système impérial, la langue officielle est l’arabe et une nouvelle monnaie est frappée remplaçant les pièces Byzantines et perses.
La pièce d’or est nommée dinar et celle d’argent le dirham.
Son règne a connu stabilité politique et expansion territoriale.
En désignant son fils Yazid comme successeur il signe l’acte de naissance de la dynastie Omeyyade.
Malgré cette erreur en changeant de façon de choisir les successeurs, passant de la consultation à un régime héréditaire il convient de rappeler qu’il fut :
⁃ un compagnon du Prophète
⁃ Un des secrétaires du Prophète écrivant la révélation
⁃ Le Prophète a épousé sa sœur Umm habiba
⁃ Il est un rapporteur de hadith reconnu
Un événement tragique arrivera durant le règne de Yazid, elle l’opposera au partisan de Husayn petit fils du prophète.
Husayn ayant refusé de prêter allégeance à Yazid, comme Ibn Omar, Abderahman le fils d’abou Bakr, AbdAllah Ibn zubayr.
Les habitants de koufa l’invitent à les rejoindre afin de lui prêter allégeance.
Yazid demande de réprimer l’agitation.
Ignorant l’agitation Husayn se rend à Koufa avec sa famille.
Arrivé à Kerbala les troupes de Yazid l’attaque, Qasim le fils de Husayn âgé de 10 ans est le premier à mourrir.
Le cheval de Husayn tombe touché par une flèche mais personne n’ose s’en prendre au petit fils du prophète.
En pleure il prend son fils AbdAllah âgé d’un an, mais une flèche l’emporte.
Assoiffé il boit de l’eau dans l’Euphrate, une flèche l’atteint à la bouche, sept à huit hommes se jettent sur lui, il est transpercé à coup de lance puis décapité, sa tente est pillé, les vêtements de ses femmes déchirés, seul son fils Ali zayn Al abidine est épargné.
La tête de Husayn est envoyé à Yazid et exposé dans une annexe de la mosquée de Damas.
Cet événement donnera naissance au chiisme qui affaiblira et divisera la communauté musulmane.
Malgré ses événements les conquêtes de nouveaux territoires continueront.
L’avènement du calife abou al Abbas Al Walid Ibn Abdelmalik nous intéresse car c’est durant son règne que débuta la conquête de l’Espagne.
Durant le règne Omeyyade la discrimination entre arabe et mawali ( converti non arabe) crée un mécontentement important chez la population qui réclame l’égalité mais ces revendications touchant directement aux intérêts de l’aristocratie arabe sont rejetées, les conquêtes augmentant le nombre de musulmans, les musulmans non arabe deviennent de plus en plus nombreux et cette discrimination sera l’une des principales causes de la révolte abbasside.
Durant le règne d’Omar Ibn Abdulaziz le principe d’égalité entre les musulmans sera réinstauré.
La dynastie abbasside
Dans ce climat de confusion la famille abbasside réclame le pouvoir.
Le calife Omeyyade Marwan 2 sera le dernier souverain de la dynastie, il sera défait en août 750 par abou al Abbas as Saffah qui prend alors le pouvoir, c’est pendant le règne du second calife Abu Jafar Al Mansour que la dynastie assoie sa véritable identité, la capitale devient Bagdad .
C’est durant cette dynastie qu’il y eu le fameux calife Haroun Ar Rashid.